Bieannale de Dakar 2020: Chroniques Tome 2

Le sujet du jour est consacré aux opportunités et défis du numérique._ 

Les mesures de restriction adoptées dans le cadre de la prévention du coronavirus ont mis le monde des arts et de la culture sous cloche et par ricochet, favorisé l’accélération du processus de digitalisation dans ce secteur.

 Cette nouvelle donne comporte des avantages et des inconvénients auxquels il faudrait être attentif, notamment dans le milieu des arts visuels.

Au demeurant, l’accélération de la digitalisation semble à pas lents et sûrs, décloisonner l’écosystème de l’art. 

En effet, la digitalisation crée en matière d’accès au marché de l’art, plus d’équité. Les artistes sur le Continent africain et ceux originaires dudit Continent peuvent, au même titre que les autres artistes, faire connaître leur travail en assurant la diffusion de leurs œuvres d’art via le digital.

 En plus d’être un outil de diffusion, le digital facilite la mise en relation de tous les maillons de la chaîne de valeur en l’occurrence les artistes, les galeries, les collectionneurs et les critiques d’art. Il met les artistes et les galeristes en de meilleures postures au moment des négociations (contrats de collaboration, contrats de vente, contrats d’exposition, etc.). Cette visibilité quasi-instantanée crée les conditions favorables pour une *valorisation juste* du travail de l’artiste et pour le développement de sa carrière. Cette visibilité crée également une plus grande interaction entre acteurs du secteur des arts visuels ; de quoi à terme, limiter le recours aux intermédiaires ou du moins, le nombre d’intermédiaires. 

L’une des illustrations les plus patentes de cette réalité est l’attrait grandissant pour les NFT (jetons non fongibles). Au demeurant, le système NFT met l’artiste en position de contrôle de la diffusion de ses œuvres. Il peut soumettre l’acquéreur à des conditions précises de présentation de son œuvre. Le système NFT lui permet de procéder à des ventes directes. Les mises en jeu pour l’achat desdites NFT sont conséquentes voire astronomiques. Le NFT donne aussi lieu à l’établissement d’un certificat de propriété sécurisé stocké sur une blockchain; ce qui contribue à rassurer l’acheteur et, certainement, à booster les ventes. En matière de vente d’œuvres d’art, le digital a aussi changé les pratiques. 

L’observatoire national des ventes aux enchères publiques en France note une augmentation de 80% desdites ventes via internet pendant la période Covid-19 en France. Nombre de maisons de ventes aux enchères publiques ont inclus les NFTs dans leurs catalogues. Cela montre à suffisance l’attrait des maisons de vente pour le digital et les facilités offertes par cet outil. Si les évolutions notables rendues possibles grâce au digital ont été communiquées, il n’en reste pas moins que le digital n’est pas sans danger. En effet, diffuser des œuvres d’art via le digital, c’est aussi courir le risque d’en perdre le contrôle. 

Les œuvres d’art  sont facilement reproductibles et/ou susceptibles d’être copiées à l’insu ou sans l’autorisation préalable de l’artiste. Également, difficile via le digital de s’assurer de la dextérité réelle de l’artiste et de son identité. Il est donc important pour les usagers du digital, d’en maîtriser au préalable les codes pour se prémunir de toute action frauduleuse et sécuriser une création et un achat. 

Enfin, la loi de l’offre et de la demande ne reflète pas forcément la qualité de la proposition artistique mise en vente. Tina ZIGLER, commissaire d’exposition, s’étonnait tout récemment de la mauvaise qualité de bon nombre de projets NFT.

Raïssa NJOYA

Publié pour la première fois sur La Voix du Koat. 

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